Le tribunal administratif condamne l’État à indemniser la commune de Toulouse et Toulouse Métropole à hauteur respectivement de 559 794 euros et 648 960 euros en réparation des dégâts causés par les manifestations liées au mouvement dit des « gilets jaunes » entre novembre 2018 et juin 2019.Par deux décisions en date du 21 avril 2022, le tribunal administratif juge que certains des préjudices subis par la commune de Toulouse et Toulouse Métropole, ponctuellement ou de manière récurrente, au cours des manifestations dites des « gilets jaunes », résultent directement de délits commis dans le prolongement de ces manifestations, par des manifestants et non par des groupes extérieurs constitués dans l’unique objectif de commettre un délit.
Le régime de responsabilité sans faute du fait des attroupements ou rassemblements est un régime légal institué par la Convention du 10 vendémiaire an IV (2 octobre 1795) pour réparer les préjudices subis par toute personne à cette occasion. Ce régime a été transféré des communes à l’État par la loi du 7 janvier 1983 et restitué à la juridiction administrative par la loi du 9 janvier 1986. Il est désormais prévu à l’article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure selon lequel : « L’État est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens. »
Sur ce fondement, la commune de Toulouse demandait la condamnation de l’État à lui verser la somme totale de 2 457 721,91 euros au titre des préjudices qu’elle estime avoir subis à raison des délits commis à l’occasion des manifestations liées aux mouvements dit des « gilets jaunes » et, pour les mêmes raisons, Toulouse Métropole demandait la condamnation de l’État à lui verser une somme totale de 1 622 714,08 euros.
Après avoir rappelé que le critère de la préméditation ne permet pas, à lui seul, d’écarter l’engagement de la responsabilité de l’État qui doit être retenue si le délit s’est produit dans le prolongement immédiat de la manifestation et est le fait de personnes ayant participé à ce rassemblement, le tribunal a apprécié, pour chaque poste de préjudices invoqué, le caractère direct et certain du lien entre les délits commis à l’occasion des manifestations des « gilets jaunes » et les dommages ou manques à gagner allégués.
Ainsi, à titre d’exemples, le tribunal a retenu un lien direct et certain pour les dégradations commises sur les horodateurs situés en centre-ville, appartenant à la commune de Toulouse, qui se situaient sur le parcours du cortège et devenaient le support de messages revendicatifs exprimés par les manifestants. Il l’a également retenu pour les dégradations sur le mobilier urbain appartenant à Toulouse Métropole et sur les chaussées et trottoirs qu’elle entretient ou encore pour les frais de nettoyage de multiples tags et graffitis et enlèvements d’affiches sauvages qui ont mobilisé chaque week-end entre le 17 novembre 2018 et le mois de juin 2019 des moyens excédant les charges qui résultent habituellement de l’exercice de cette compétence par Toulouse Métropole.
Le tribunal n’a toutefois pas retenu un tel lien pour la perte de recettes qui serait liée à la mise hors service des horodateurs de la commune, les usagers étant notamment censés rechercher un dispositif en état de fonctionnement à proximité dans un tel cas. Le tribunal a également écarté, pour absence de lien direct et certain, l’indemnisation des dégradations commises sur les caméras de vidéo-protection, ces dégradations ayant pu être commises par des éléments extérieurs à la manifestation. Enfin ont également été écartées l’indemnisation de l’annulation de la « fête de la Violette » par la commune de Toulouse qui résulte de la seule reconduite hebdomadaire des mobilisations tout comme celle de la perte de redevances liée à la baisse de la fréquentation des parkings du centre-ville demandée par Toulouse Métropole.
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Contact presse : Léa Matteaccioli : lea.matteaccioli@juradm.fr