Pour la troisième fois cet été, le tribunal administratif de Toulouse suspend l’exécution d’arrêtés de la préfète de l’Ariège autorisant la mise en œuvre de tirs d’effarouchement destinés à prévenir les dommages aux troupeaux sur certaines estives.
Par une ordonnance rendue le 31 août 2022, le juge des référés, saisi par l’association One voice aux fins de suspension de deux nouveaux arrêtés en date du 29 août 2022 par lesquels la préfète de l’Ariège a autorisé, à la demande du groupement pastoral d’Ustou Col d’Escots et de celui d’Arreau, l’effarouchement par tirs non létaux d’ours brun (Ursus arctos) sur leurs estives respectives pour prévenir les dommages aux troupeaux, cette fois seulement pour les deux nuits des 30 et 31 août 2022. Afin de pouvoir se prononcer utilement sur les mérites de la requête de l’association, le tribunal a tenu audience le lendemain même de sa saisine, avant l’expiration des effets de ces deux arrêtés.
Saisi sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, le juge des référés peut suspendre l’exécution d’une décision administrative lorsque l’urgence le justifie et qu’existe un doute sérieux sur sa légalité.
Pour retenir que la condition tenant à l’urgence était satisfaite, le juge des référés a notamment estimé que le risque que la mise en œuvre des mesures d’effarouchement ait pour conséquence de repousser l’ours des deux estives, qui est une composante de son habitat naturel, et donc de l’évincer d’une partie de son aire de répartition naturelle n’est pas nul. Le juge a pris en considération, dans la balance des intérêts en présence, la situation de stress et de souffrance psychologique pour les éleveurs et les bergers en estive confrontés à la prédation de l’ours invoquée par la préfète, pour toutefois conclure que les enjeux tenant à la préservation de l’espèce imposent de prioriser sensiblement les mesures nécessaires à cette conservation, ce alors même que les atteintes à l’espèce pourraient apparaître peu significatives.
Quant à l’existence d’un doute sérieux sur la légalité des arrêtés du 29 août 2022 : alors que par deux ordonnances des 3 août 2022 et 22 août 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a suspendu l’exécution de deux précédents arrêtés autorisant sur ces mêmes estives les tirs d’effarouchement au double motif que l’ensemble des mesures utiles de protection des troupeaux n’avait pas été mis en place par les deux groupements pastoraux et que l’administration n’établissait pas la réalité de dommages importants aux troupeaux au sens et pour l’application des dispositions de l’article L. 411-2 du code de l’environnement, le juge des référés a cette fois constaté que la préfète de l’Ariège a édicté ces nouveaux arrêtés du 29 août 2022 en se bornant à reprendre, sans apporter d’éléments nouveaux, l’argumentaire qu’elle avait développé pour défendre les arrêtés finalement suspendus. Ce faisant, la préfète méconnaît l’autorité qui s’attache à ces ordonnances des 3 et 22 août 2022.
Dans ces conditions et en l’état des éléments qui lui étaient soumis, le juge des référés a considéré qu’il existait un doute sérieux quant à la légalité de ces deux arrêtés du 29 août 2022 et en a donc suspendu l’exécution.
La formation collégiale du tribunal administratif de Toulouse, qui reste saisie de la demande d’annulation de ces arrêtés du 29 août 2022, examinera prochainement au fond leur légalité.
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